Les dynamiques émotionnelles collectives

Didry, N., & Giannelloni, J.-L. (2019). Les dynamiques émotionnelles collectives. Perspectives pour le marketing. Recherche et Applications en Marketing, 34(1), 1-28.

Mots-clés : Climat émotionnel, contagion émotionnelle, dynamiques émotionnelles collectives, émotions collectives, partage social des émotions.

Didry et Giannelloni (2019) analysent la manière dont les émotions ne sont pas uniquement des ressentis individuels, mais peuvent aussi être des phénomènes collectifs, influençant les comportements des consommateurs. L’objectif principal de leur étude est d’explorer comment ces dynamiques émotionnelles collectives émergent, se propagent et façonnent l’expérience de consommation.

Développement :

Les auteurs définissent les émotions collectives comme des états affectifs partagés simultanément par plusieurs individus en réponse à un même événement ou contexte. Cette approche s’inspire des travaux de Durkheim (1912) sur l’effervescence collective et de Rimé (2007, 2009) sur le partage social des émotions.

Les dynamiques émotionnelles collectives reposent sur plusieurs processus :

  • L’émotion de groupe, qui apparaît lorsque les individus ressentent une émotion en tant que membres d’un collectif (Barsade & Gibson, 2007).
  • Le climat émotionnel, qui désigne l’atmosphère affective dominante d’un groupe à un instant donné (De Rivera & Páez, 2007).
  • La contagion émotionnelle, qui correspond à la transmission rapide des émotions par imitation, souvent de manière inconsciente (Hatfield, Cacioppo & Rapson, 1994 ; Barsade, 2002).
  • Le partage social des émotions, où les individus échangent leurs émotions, renforçant ainsi leur intensité et leur diffusion dans le groupe (Rimé et al., 1991, 2005).

Les auteurs montrent que ces dynamiques jouent un rôle central dans de nombreux contextes de consommation, notamment :

  • Les événements de marque et spectacles : un fort engagement émotionnel collectif crée une expérience plus marquante, favorisant l’attachement à la marque (Kozinets, 2002).
  • Les espaces commerciaux : l’aménagement des lieux peut influencer le climat émotionnel ressenti par les consommateurs (Bitner, 1992).
  • Le shopping en groupe : les émotions partagées entre amis ou membres d’une communauté renforcent la satisfaction d’achat (Arnould & Price, 1993).

Cette approche collective des émotions s’oppose aux modèles traditionnels centrés sur l’émotion individuelle ressentie lors d’une interaction avec un vendeur ou un produit (Pugh, 2001 ; Hennig-Thurau et al., 2006).

 

L’article propose plusieurs recommandations pour intégrer ces dynamiques émotionnelles collectives dans les stratégies marketing :

  1. Créer des expériences immersives et engageantes

Organiser des événements où les consommateurs vivent une expérience émotionnelle synchronisée (festivals, flash mobs, lancements de produits).

Encourager la participation active des clients pour renforcer leur engagement émotionnel collectif (Pine & Gilmore, 1999).

  1. Favoriser la contagion émotionnelle positive en point de vente

Concevoir des espaces qui stimulent des interactions positives et du partage émotionnel.

Utiliser des stimuli sensoriels (musique, éclairage, arômes) pour influencer l’atmosphère affective du lieu (Bitner, 1992).

  1. Adapter la communication en fonction du climat émotionnel dominant

Détecter et analyser les émotions collectives des consommateurs (via les réseaux sociaux, études qualitatives).

Adapter les messages et le ton des campagnes en fonction de l’état émotionnel des communautés ciblées.

Conclusion

L’étude de Didry et Giannelloni (2019) souligne l’importance des émotions collectives en marketing, un sujet encore peu exploité dans les stratégies commerciales classiques.

Les auteurs montrent que les émotions ne sont pas seulement des phénomènes individuels, mais qu’elles se construisent et se diffusent à travers les interactions sociales et les environnements collectifs.

Les implications de cette approche ouvrent de nouvelles perspectives pour le marketing expérientiel, notamment dans les événements de marque, le retail et la gestion des espaces commerciaux, où la gestion des dynamiques émotionnelles collectives pourrait devenir un levier stratégique majeur.

Références bibliographiques

Arnould, E. J., & Price, L. L. (1993). River magic: Extraordinary experience and the extended service encounter. Journal of Consumer Research, 20(1), 24-45.

Barsade, S. G. (2002). The ripple effect: Emotional contagion and its influence on group behavior. Administrative Science Quarterly, 47(4), 644–675.

Barsade, S. G., & Gibson, D. E. (2007). Why does affect matter in organizations? Academy of Management Perspectives, 21(1), 36-59.

Bitner, M. J. (1992). Servicescapes: The impact of physical surroundings on customers and employees. Journal of Marketing, 56(2), 57–71.

De Rivera, J., & Páez, D. (2007). Emotional climates, human security, and cultures of peace. Journal of Social Issues, 63(2), 233-253.

Didry, N., & Giannelloni, J.-L. (2019). Les dynamiques émotionnelles collectives. Perspectives pour le marketing. Recherche et Applications en Marketing, 34(1), 1-28.

Hatfield, E., Cacioppo, J. T., & Rapson, R. L. (1994). Emotional contagion. Cambridge University Press.

Pine, B. J., & Gilmore, J. H. (1999). The experience economy: Work is theatre and every business a stage. Harvard Business School Press.

Rimé, B. (2007). The social sharing of emotion as an interface between individual and collective processes in the construction of emotional climates. Journal of Social Issues, 63(2), 307-322.

How experience variety shapes post-purchase product evaluation

Etkin, J., & Sela, A. (2016). How experience variety shapes post-purchase product evaluation. Journal of Marketing Research, 53(1), 77-90.

Mots-clés : Expérience, variété perçue, évaluation post-achat, perception de fréquence d’usage, satisfaction client.

Dans cet article, Etkin et Sela (2016) examinent comment la diversité des expériences d’usage d’un produit influence son évaluation après l’achat. Contrairement aux travaux de Moreau, Lehmann et Markman (2001) et Hoch & Deighton (1989), qui suggèrent qu’une plus grande variété d’expériences renforce l’apprentissage et l’attachement au produit, les auteurs démontrent que des expériences perçues comme moins variées peuvent paradoxalement conduire à une meilleure évaluation post-achat.

Développement

La perception de la variété des expériences repose sur l’idée que les consommateurs interprètent l’usage de leurs produits à travers des raccourcis mentaux. Redden (2008) montre que lorsque les expériences sont structurées et répétées, elles donnent une impression de continuité, tandis que des expériences trop variées donnent une sensation de fragmentation.

L’étude d’Etkin & Sela (2016, p. 78) s’appuie sur cette approche en démontrant que la diversité perçue influence directement la perception de la fréquence d’usage. Plus les expériences sont perçues comme homogènes, plus les consommateurs ont l’impression d’utiliser fréquemment leur produit, ce qui renforce leur satisfaction.

Ce résultat va à l’encontre des travaux de Hoch & Deighton (1989) et Moreau, Lehmann & Markman (2001), qui suggéraient que la diversité d’usage favorise l’apprentissage du produit et augmente l’attachement du consommateur. Au contraire, Etkin & Sela (2016, p. 79) montrent que cette diversité perçue peut nuire à l’évaluation du produit en donnant une impression d’usage plus rare.

L’effet observé varie en fonction de la nature du produit (Dhar & Wertenbroch, 2000).

  • Pour les produits utilitaires (chaussures de sport, tasses à café), l’impression d’usage fréquent améliore fortement la satisfaction post-achat. Comme ces produits sont évalués en fonction de leur utilité et de leur intégration dans le quotidien, une régularité perçue est essentielle (Etkin & Sela, 2016, p. 85).
  • Pour les produits hédoniques (parfums, films), la diversité des expériences ne diminue pas significativement la satisfaction, car ces produits sont évalués selon leur capacité à générer du plaisir et de la variété (Hirschman & Holbrook, 1982).

Ces résultats montrent que les attentes des consommateurs diffèrent selon le type de produit, ce qui implique des ajustements stratégiques en marketing (Kivetz & Simonson, 2003).

  • Le moment où un consommateur évalue un produit influence sa perception de la diversité des expériences (Trope & Liberman, 2010).

Avant l’achat, les consommateurs adoptent une vision abstraite et idéalisée du produit, ce qui les amène à négliger l’effet de la diversité perçue.

Après l’achat, l’expérience devient plus concrète, et les consommateurs commencent à évaluer leur produit en fonction de la fréquence perçue de son usage (Etkin & Sela, 2016, p. 87).

Cela montre que les entreprises doivent adapter leur communication en fonction du moment du parcours client, en insistant sur un usage régulier après l’achat pour maximiser la satisfaction.

  • Les auteurs ont testé si les émotions vécues pendant l’usage influencent la relation entre la diversité perçue et la satisfaction.

Ils constatent que même en contrôlant la valence des expériences (positives ou négatives), les résultats restent robustes.

Cela signifie que les émotions n’expliquent pas directement la baisse de satisfaction liée à une grande diversité perçue (Etkin & Sela, 2016, p. 88).

Ainsi, c’est bien la perception de la fréquence d’usage qui joue un rôle déterminant, et non simplement l’impact des émotions vécues.

  • Les résultats d’Etkin & Sela (2016) suggèrent plusieurs stratégies pour améliorer la satisfaction client :

Mettre en avant un usage fréquent du produit dans la communication publicitaire (Goodman & Irmak, 2013).

Structurer les expériences client pour éviter une diversité excessive, en encourageant des scénarios d’usage récurrents et prévisibles (Redden, 2008).

Adapter la stratégie selon le type de produit :

Produits utilitaires → Valoriser une routine d’usage et l’intégration dans le quotidien.

Produits hédoniques → Laisser plus de flexibilité et d’expérimentation.

Ces résultats sont particulièrement utiles pour les marques qui souhaitent optimiser l’expérience client en structurant mieux la perception d’usage de leurs produits.

Conclusion

L’article d’Etkin et Sela (2016) démontre que moins de variété perçue dans les usages d’un produit conduit à une meilleure évaluation post-achat. Ce phénomène s’explique par la perception accrue de fréquence d’usage, qui joue un rôle clé dans la satisfaction des consommateurs.

Les implications pour les entreprises sont nombreuses : elles doivent structurer leur communication en mettant en avant des expériences homogènes et récurrentes, notamment pour les produits utilitaires. Cette recherche invite à repenser certaines stratégies marketing, en accordant plus d’importance à la manière dont la fréquence perçue influence la relation du consommateur avec le produit.

Références bibliographiques

Dhar, R., & Wertenbroch, K. (2000). Consumer choice between hedonic and utilitarian goods. Journal of Marketing Research, 37(1), 60–71.

Goodman, J. K., & Irmak, C. (2013). Having versus consuming: Failure to estimate usage frequency makes consumers prefer multifeature products. Journal of Marketing Research, 50(1), 44–54.

Hirschman, E. C., & Holbrook, M. B. (1982). Hedonic consumption: Emerging concepts, methods and propositions. Journal of Marketing, 46(3), 92–101.

Hoch, S. J., & Deighton, J. (1989). Managing what consumers learn from experience. Journal of Marketing, 53(2), 1–20.

Kivetz, R., & Simonson, I. (2003). The effects of incomplete information on consumer choice. Journal of Marketing Research, 40(1), 58–66.

Moreau, C. P., Lehmann, D. R., & Markman, A. B. (2001). Entrenched knowledge structures and consumer response to new products. Journal of Marketing Research, 38(1), 14–29.

Redden, J. P. (2008). Reducing satiation: The role of categorization level. Journal of Consumer Research, 34(5), 624–634.

Trope, Y., & Liberman, N. (2010). Construal-level theory of psychological distance. Psychological Review, 117(2), 440–463.

Emotional Energy: When Customer Interactions Energize Service Employees

Cayla, J., & Auriacombe, B. (2024). Emotional Energy: When Customer Interactions Energize Service Employees. Journal of Marketing, 89, 1-18.

Mots-clés : Énergie émotionnelle, interactions client-employé, service, travail émotionnel, ethnographie, marketing expérientiel.

 Julien Cayla et Brigitte Auriacombe explorent une approche novatrice des interactions entre employés de service et clients. Contrairement aux recherches antérieures qui décrivent ces interactions comme émotionnellement épuisantes, les auteurs montrent que certaines situations peuvent, au contraire, régénérer les employés en leur procurant une “énergie émotionnelle” (Collins, 2004).

À partir d’une enquête ethnographique menée dans les villages Club Med, ils identifient les facteurs qui influencent cette énergie émotionnelle et proposent un cadre permettant aux organisations de service d’optimiser cet atout crucial.

Développement :

  • L’énergie émotionnelle est définie par Collins (2004, p. 49) comme un état de confiance, enthousiasme et force ressenti lors d’interactions sociales réussies. Cette notion repose sur la théorie des rituels d’interaction, qui explique pourquoi certaines interactions dynamisent tandis que d’autres épuisent (Collins, 2004).

Selon Cayla et Auriacombe, quatre conditions favorisent la génération d’énergie émotionnelle lors des interactions de service :

  1. Coprésence physique : la proximité des corps dans l’espace crée un sentiment d’appartenance (Collins, 2004).
  2. Attention mutuelle : le fait que tous les participants se concentrent sur le même objet favorise la synchronisation émotionnelle (Collins, 2004).
  3. Humeur partagée : la contagion émotionnelle collective amplifie l’énergie ressentie (Hennig-Thurau et al., 2006).
  4. Barrières aux intrus : une séparation claire entre initiés et extérieurs renforce l’intensité émotionnelle (Durkheim, 1912).

Ces conditions expliquent pourquoi certains employés trouvent du plaisir et de la vitalité dans leurs interactions avec les clients, malgré la charge émotionnelle du travail de service (Cayla et Auriacombe, 2025).

  • Dans leur étude ethnographique au Club Med, Cayla et Auriacombe (2025) identifient deux types d’interactions qui régénèrent les employés de service :
  1. Les rassemblements effervescents
    • Événements collectifs intenses (spectacles, soirées) créant une fusion émotionnelle (Durkheim, 1912). Ces moments génèrent une énergie émotionnelle contagieuse, ce qui explique pourquoi certains employés de service se portent volontaires pour participer à ces événements malgré leur caractère non rémunéré (Cayla et Auriacombe, 2025).
  2. Les bulles d’intimité
    • Ce sont des interactions plus personnelles entre employés et clients, qui se produisent par exemple lors de repas partagés (Cayla et Auriacombe, 2025). Ils é favorisent un sentiment de reconnaissance et d’humanité dans le travail, similaire à ce que Price et Arnould (1999) ont observé chez les coiffeurs, qui développent des relations de confiance avec leurs clients.

Les auteurs Cayla et Auriacombe soulignent que le travail de service est souvent marqué par une asymétrie de pouvoir entre employés et clients (Taylor et Bain, 1999 ; Sherman, 2003). Cependant, ils identifient deux facteurs qui permettent de rehausser l’énergie émotionnelle des employés :

  1. Le statut
    • Certains moments permettent une élévation temporaire du statut des employés de service. Par exemple, lorsqu’un employé monte sur scène lors d’un spectacle, il devient le centre de l’attention, ce qui génère un choc de statut (Maoret, Marchesini et Ertug, 2023).
    • Ce phénomène est similaire à ce qu’Üstüner et Thompson (2012) décrivent comme des rituels de pouvoir inversés, où les employés acquièrent une forme de domination temporaire.
  2. L’autonomie
    • Lorsque les employés ont plus de liberté dans leur manière d’interagir avec les clients, ils trouvent davantage de plaisir et de sens dans leur travail (Cayla et Auriacombe, 2025).
    • À l’inverse, si les interactions deviennent une obligation imposée par la direction (ex. participation forcée aux repas avec les clients), elles perdent leur potentiel énergétique et deviennent source d’épuisement émotionnel (Grandey, 2000).

Enfin, l’article met en lumière le rôle des chaînes de rituels d’interaction (Collins, 2004) dans le travail de service :

  • Les interactions positives (ex. une soirée réussie, un bon échange avec un client) créent des spirales d’énergie ascendantes, où les employés accumulent de l’enthousiasme au fil de la journée (Cayla et Auriacombe, 2025).
  • Les interactions négatives (ex. confrontation avec un client difficile) peuvent briser cette dynamique et mener à une accumulation de rituels ratés, provoquant du stress et de la lassitude (Taylor et Bain, 1999).

Les entreprises de service doivent donc structurer les interactions de manière à favoriser les moments énergisants et à réduire les sources de tension (Cayla et Auriacombe, 2025).

Conclusion

L’étude de Cayla et Auriacombe apporte une nouvelle perspective sur les interactions client-employé en démontrant qu’elles peuvent être source d’énergie émotionnelle plutôt que de fatigue. En mobilisant la théorie des rituels d’interaction, les auteurs expliquent comment certaines conditions, telles que l’engagement collectif et l’autonomie des employés, permettent de transformer les interactions de service en expériences régénératrices. Ces résultats ouvrent des pistes pour repenser l’organisation du travail en front office afin d’améliorer le bien-être des employés et optimiser l’expérience client.

Références bibliographiques

Chan, K. W., & Wan, E. W. (2012). How can stressed employees deliver better customer service? The underlying self-regulation process. Journal of Marketing, 76(1), 119-137.

Collins, R. (2004). Interaction ritual chains. Princeton University Press.

Durkheim, É. (1912). Les formes élémentaires de la vie religieuse: Le système totémique en Australie. Presses Universitaires de France.

Grandey, A. A. (2000). Emotion regulation in the workplace: A new way to conceptualize emotional labor. Journal of Occupational Health Psychology, 5(1), 95-110.

Hennig-Thurau, T., Groth, M., Paul, M., & Gremler, D. D. (2006). Are all smiles created equal? How emotional contagion and emotional labor affect service relationships. Journal of Marketing, 70(3), 58-73.

Maoret, M., Marchesini, G., & Ertug, G. (2023). Status dynamics in organizations: How temporary status shocks shape employee engagement. Academy of Management Journal, 66(2), 385-412.

Price, L. L., & Arnould, E. J. (1999). Commercial friendships: Service provider-client relationships in context. Journal of Marketing, 63(4), 38-56.

Rouquet, A., & Suquet, J.-B. (2021). Customer sovereignty and service work: The paradox of employee control. Journal of Service Research, 24(2), 212-228.

Sherman, R. (2003). Class acts: Service and inequality in luxury hotels. University of California Press.

Taylor, P., & Bain, P. (1999). “An assembly line in the head”: Work and employee relations in the call centre. Industrial Relations Journal, 30(2), 101-117.

Üstüner, T., & Thompson, C. J. (2012). How marketplace performances produce interdependent status games and contested forms of symbolic capital. Journal of Consumer Research, 38(5), 796-814.

 

 

Brand Experience: What Is It? How Is It Measured? Does It Affect Loyalty?

Brakus, J. J., Schmitt, B. H., & Zarantonello, L. (2009). Brand Experience: What Is It? How Is It Measured? Does It Affect Loyalty? Journal of Marketing, 73(3), 52–68.

Mots-clés : Expérience de marque, marketing expérientiel, fidélité client, gestion de l’expérience client, mesure de l’expérience de marque.

Brakus, Schmitt et Zarantonello (2009) analysent l’expérience de marque comme un concept distinct des notions classiques de marketing, telles que l’image et la personnalité de marque (Aaker, 1997). Ils la définissent comme un processus multidimensionnel intégrant des réactions sensorielles, affectives, cognitives et comportementales face aux stimuli de la marque (design, packaging, communication, environnement).

Contrairement à la personnalité et à l’attachement à la marque (Thomson, MacInnis & Park, 2005), qui reposent sur des associations symboliques, l’expérience de marque résulte d’une interaction directe vécue par le consommateur (Brakus et al., 2009, p. 54). Les auteurs développent et valident empiriquement une échelle de mesure, démontrant à travers six études que l’expérience de marque influence directement la fidélisation et l’engagement des clients. Leur analyse souligne que les marques offrant une expérience immersive et cohérente favorisent un attachement plus fort et durable.

Développement :

Brakus et al. (2009, p. 53) définissent l’expérience de marque comme l’ensemble des réactions subjectives et comportementales suscitées par l’interaction avec une marque. Ces réactions sont déclenchées par divers stimuli, allant de l’esthétique du produit aux communications publicitaires.

Contrairement aux approches centrées sur la personnalité de marque (Aaker, 1997) et l’attachement à la marque (Thomson, MacInnis & Park, 2005), l’expérience de marque ne repose pas uniquement sur des associations symboliques, mais bien sur un vécu dynamique et interactif (Brakus et al., 2009, p. 54). Elle peut être immédiate ou se développer sur le long terme, et varie en intensité et en nature selon l’individu et le contexte d’interaction (Brakus et al., 2009, p. 55).

D’après les auteurs il y a quatre dimensions fondamentales de l’expérience de marque, en lien avec des travaux antérieurs sur la perception et la consommation :

  • Sensorielle : Les marques mobilisent la vue, l’ouïe, l’odorat, le toucher et le goût pour enrichir l’expérience du consommateur (Schmitt, 1999).
  • Affective : L’expérience de marque suscite des émotions et des sentiments forts, influençant l’attitude du consommateur (Holbrook & Batra, 1987).
  • Intellectuelle : Certaines marques stimulent la réflexion et l’apprentissage, favorisant une implication cognitive (Hoch & Deighton, 1989).
  • Comportementale : L’expérience impacte les actions des consommateurs, y compris leur engagement avec la marque et leur propension à interagir avec d’autres clients (Ajzen, 1985).

Brakus et al. (2009, p. 66) démontrent que les marques qui offrent une expérience forte génèrent une fidélité plus élevée. Ce lien avait déjà été étudié par Oliver (1999), qui a montré que la fidélité ne repose pas uniquement sur la satisfaction, mais aussi sur une attache émotionnelle et expérientielle.

Afin de mesurer cette expérience, les auteurs conçoivent une échelle empirique basée sur les quatre dimensions identifiées. En suivant la méthodologie de Churchill (1979), ils valident leur échelle à travers six études distinctes, démontrant ainsi que l’expérience de marque est un concept mesurable et différencié des autres notions marketing comme la satisfaction ou l’image de marque.

Concernant l’impact sur la fidélisation et la satisfaction, les résultats montrent que les marques qui génèrent une forte expérience multisensorielle et émotionnelle fidélisent davantage leurs consommateurs (Brakus et al., 2009, p. 66). Oliver (1999) avait déjà établi un lien entre satisfaction et fidélité, mais Brakus et al. montrent que l’expérience de marque agit indépendamment de la satisfaction, en influençant directement l’attachement et la recommandation.
Certaines marques comme Apple et Nike offrent une expérience immersive et engageante, tandis que d’autres comme Visa ou Wal-Mart génèrent des interactions plus neutres (Brakus et al., 2009, p. 67).

Conclusion

L’étude de Brakus, Schmitt et Zarantonello (2009) met en lumière l’importance de l’expérience de marque comme un levier stratégique influençant la satisfaction et la fidélité des consommateurs. En proposant une échelle de mesure empirique, les auteurs montrent que l’expérience de marque repose sur des dimensions sensorielles, affectives, intellectuelles et comportementales, et qu’elle se distingue des notions de personnalité ou d’attachement à la marque. Cette recherche souligne ainsi la nécessité pour les entreprises d’intégrer une approche expérientielle cohérente afin de renforcer l’engagement des consommateurs et de se différencier sur un marché concurrentiel.

Références bibliographiques :

Aaker, J. L. (1997). Dimensions of brand personality. Journal of Marketing Research, 34(3), 347-356.

Ajzen, I. (1985). From intentions to actions: A theory of planned behavior. Springer Series in Social Psychology, 11-39.

Churchill, G. A. (1979). A paradigm for developing better measures of marketing constructs. Journal of Marketing Research, 16(1), 64-73.

Fournier, S. (1998). Consumers and their brands: Developing relationship theory. Journal of Consumer Research, 24(4), 343-373.

Holbrook, M. B., & Hirschman, E. C. (1982). The experiential aspects of consumption. Journal of Consumer Research, 9(2), 132-140.

Oliver, R. L. (1999). Whence consumer loyalty? Journal of Marketing, 63(4), 33-44.

 

Understanding Customer Experience Throughout the Customer Journey

Lemon, K. N., & Verhoef, P. C. (2016). Understanding Customer Experience Throughout the Customer Journey. Journal of Marketing, 80(6), 69-96.

Mots-clés : Expérience client, Parcours client, Gestion de l’expérience client, Touchpoints, Engagement client

Katherine N. Lemon et Peter C. Verhoef analysent l’expérience client en adoptant une vision intégrée du parcours client. Ils montrent que l’expérience client ne se limite pas à un seul point de contact, mais se construit au fil dinteractions multiples avec l’entreprise à travers différents canaux et supports. L’article met en évidence le caractère multidimensionnel de l’expérience client, qui comprend des aspects sensoriels, affectifs, cognitifs, comportementaux et sociaux. La perception de l’expérience varie en fonction de la cohérence des interactions et de la qualité perçue à chaque étape du parcours client.

Développement :

L’expérience client est un concept complexe qui va au-delà de la simple satisfaction ou de la qualité perçue d’un service. Abbott (1955) et Alderson (1957) avaient déjà souligné que “ce que recherchent réellement les consommateurs, ce ne sont pas des produits, mais des expériences satisfaisantes”. Cette approche a été approfondie dans les années 1980 par Holbrook et Hirschman (1982), qui insistent sur les dimensions cognitives, affectives et sensorielles de la consommation.

Les auteurs rappellent que l’expérience client est multidimensionnelle et comprend cinq composantes principales :

  1. Sensorielle : interaction avec l’environnement physique et digital de l’entreprise.
  2. Émotionnelle : ressenti et connexion affective avec la marque.
  3. Cognitive : réflexion et interprétation des informations reçues.
  4. Comportementale : actions et décisions prises en fonction de l’expérience.
  5. Sociale : influence des pairs et des interactions avec d’autres consommateurs (Lemon & Verhoef, 2016, p. 72).

Les entreprises doivent donc concevoir des expériences holistiques et immersives, qui prennent en compte ces différentes dimensions. Pine et Gilmore (1999) avaient déjà introduit le concept d’économie de l’expérience, où la valeur d’un produit ne repose plus uniquement sur ses attributs fonctionnels, mais sur l’expérience qu’il procure.

Lemon et Verhoef structurent le parcours client en trois grandes phases :

  1. Pré-achat : phase de recherche d’informations, d’exposition aux publicités et de comparaison entre différentes options. L’expérience client débute dès cette étape, où le consommateur commence à se forger une perception de la marque (Lemon & Verhoef, 2016, p. 75).
  2. Achat : moment clé de la transaction, où l’environnement d’achat, la fluidité du processus et l’accompagnement influencent directement l’expérience perçue.
  3. Post-achat : phase cruciale où le consommateur évalue son achat et interagit avec le service après-vente. C’est à ce moment que se construisent la fidélisation et l’engagement du client à travers le bouche-à-oreille et le partage d’expérience sur les réseaux sociaux (Lemon & Verhoef, 2016, p. 78).

Chaque étape est influencée par une multitude de points de contact, qui peuvent être contrôlés par l’entreprise (ex : site web, publicités, vendeurs) ou externes (ex : avis en ligne, recommandations d’amis). Les auteurs insistent sur l’importance pour les entreprises d’adopter une vision omnicanale afin d’assurer une cohérence entre les différents canaux d’interaction (Verhoef et al., 2015).

  • Au niveau de la gestion de l’expérience client : Lemon et Verhoef identifient plusieurs défis majeurs liés à la gestion de l’expérience client :

Fragmentation des canaux : Les consommateurs interagissent avec les marques via de multiples canaux (physique, digital, social media, service client), rendant la gestion de l’expérience plus complexe.

Perte de contrôle : L’entreprise ne maîtrise plus l’intégralité du parcours client, car les avis en ligne, les recommandations et le bouche-à-oreille influencent fortement la perception de la marque (Libai et al., 2010).

Mesure de l’expérience : Il est difficile de quantifier et d’évaluer l’impact de chaque point de contact sur la satisfaction et la fidélisation client (Homburg et al., 2015).

Intégration des fonctions de l’entreprise : La gestion de l’expérience client nécessite une collaboration entre plusieurs départements (marketing, logistique, service client, IT) pour garantir une continuité et une cohérence dans l’expérience proposée (Lemon & Verhoef, 2016, p. 88).

Les auteurs insistent sur la nécessité d’adopter une approche centrée sur le client et d’utiliser des outils d’analyse comme le customer journey mapping pour identifier les points de friction et optimiser l’expérience.

Conclusion

L’article met en lumière l’importance d’une gestion intégrée de l’expérience client, qui repose sur la compréhension du parcours client et la coordination des interactions à travers les différents canaux. Une approche omnicanale, une vision centrée sur le client et l’analyse des données sont essentielles pour optimiser l’expérience et renforcer l’engagement des consommateurs.

Références bibliographiques

Holbrook, M. B., & Hirschman, E. C. (1982). The experiential aspects of consumption: Consumer fantasies, feelings, and fun. Journal of Consumer Research, 9(2), 132-140.

Libai, B., Bolton, R., Bügel, M. S., de Ruyter, K., Götz, O., Risselada, H., & Stephen, A. T. (2010). Customer-to-customer interactions: Broadening the scope of word of mouth research. Journal of Service Research, 13(3), 267-282.

Pine, B. J., & Gilmore, J. H. (1999). The Experience Economy: Work is Theatre and Every Business a Stage. Harvard Business School Press.

Verhoef, P. C., Kannan, P. K., & Inman, J. J. (2015). From multi-channel retailing to omni-channel retailing. Journal of Retailing, 91(2), 174-181.

 

 

 

 

Le marketing de la production d’expérience

Filser, M. (2002). Le marketing de la production d’expérience : statut théorique et implications managériales. Décisions Marketing, 28, 13-22.

Mots-clés : Expérience de consommation, Marketing expérientiel, Production d’expérience, Valeur perçue, Stratégie marketing

Marc Filser analyse le concept de production d’expérience et son rôle dans le marketing moderne. Il s’appuie sur les travaux de Holbrook et Hirschman (1982) pour montrer que la consommation dépasse la simple transaction commerciale et inclut une dimension expérientielle et émotionnelle.

L’article met en évidence le rôle croissant des émotions, de la mise en scène et de l’interaction consommateur-produit dans l’élaboration de stratégies marketing efficaces où la valeur perçue repose sur le vécu du consommateur. Filser examine également une transformation fondamentale du rôle du consommateur, qui devient co-acteur de l’expérience proposée par l’entreprise.

Développement :

Le marketing traditionnel repose sur une approche transactionnelle où la valeur perçue est principalement liée aux caractéristiques fonctionnelles du produit ou du service. Cependant, les travaux de Holbrook et Hirschman (1982) ont montré que la consommation englobe aussi une dimension expérientielle, où les émotions, la mise en scène et l’interaction avec l’environnement prennent une place centrale. Cette évolution marque la transition vers ce que Filser (2002) nomme le « marketing de la production d’expérience ».

Filser (2002, p. 15) explique que “la consommation ne se réduit pas à la simple utilisation d’un bien ou service, elle constitue une expérience influencée par des dimensions affectives, sensorielles et sociales”. Ainsi, le rôle des entreprises n’est plus seulement de proposer un produit, mais de créer un univers immersif où le consommateur vit une expérience unique. Cette approche rejoint la théorie de Pine et Gilmore (1999), qui évoquent une économie de l’expérience, où la valeur ajoutée d’un bien ou d’un service dépend de la manière dont il est mis en scène.

  • L’expérience de consommation repose sur plusieurs dimensions qui influencent la perception et l’engagement du consommateur. Filser s’appuie sur la classification de Holbrook (2000) pour structurer ces éléments en quatre catégories :

Le divertissement : lorsque l’expérience apporte une dimension ludique ou immersive (exemple : les concerts, les parcs d’attractions).

L’éducation : lorsqu’elle favorise l’apprentissage et l’enrichissement personnel (exemple : les ateliers de dégustation ou de création artistique).

L’évasion : lorsque le consommateur est transporté dans un univers fictionnel (exemple : les escape games, les parcs à thème).

L’esthétique : lorsque la perception de l’expérience repose sur son aspect visuel et sensoriel (exemple : les concept stores de luxe, les musées interactifs).

Filser (2002, p. 18) affirme que “les entreprises doivent penser l’expérience comme une mise en scène, combinant une dimension esthétique et narrative pour susciter l’engagement du consommateur”. Ainsi, la création d’une expérience réussie ne repose pas uniquement sur le produit, mais sur l’ensemble des éléments environnementaux et interactifs qui structurent l’expérience vécue par le consommateur.

  • Le consommateur, co créateur de son expérience : L’un des points majeurs soulevés par Filser est que le consommateur ne se contente plus d’être un simple récepteur passif des offres commerciales. Il devient un acteur impliqué dans la construction de son propre parcours expérientiel.

Cette vision rejoint les théories du marketing relationnel (Firat & Venkatesh, 1995) qui insistent sur l’importance des interactions entre le consommateur, la marque et les autres participants à l’expérience. Dans un magasin, par exemple, l’expérience sera enrichie par l’ambiance sonore, l’éclairage, la présentation des produits, mais aussi par l’accueil des vendeurs et la possibilité de tester ou personnaliser l’offre.

Filser souligne ainsi que la valeur perçue de l’expérience dépend de la liberté d’action laissée au consommateur, de son engagement émotionnel, et de sa capacité à interagir.

Conclusion

L’article de Filser (2002) apporte une contribution essentielle à la compréhension du marketing expérientiel, en montrant que la consommation ne repose plus uniquement sur des aspects fonctionnels mais sur une mise en scène globale de l’offre. Il met en avant l’importance des émotions, de l’interaction et de la co-création, tout en soulignant les défis associés à cette approche.

Le marketing de la production d’expérience représente donc un levier stratégique puissant, mais nécessite une approche réfléchie pour éviter les écueils liés à la sur-stimulation ou à l’artificialité des expériences proposées.

 

Bibliographie :

Filser, M. (2002). Le marketing de la production d’expérience : statut théorique et implications managériales. Décisions Marketing, 28, 13-22.

Holbrook, M. B. & Hirschman, E. C. (1982). The experiential aspects of consumption: Consumer fantasies, feelings, and fun. Journal of Consumer Research, 9(2), 132-140.

Holbrook, M. B. (2000). The Millennial Consumer in the Texts of Our Times: Experience and Entertainment. Journal of Macromarketing, 20(2), 178-192.

Pine, B. J., & Gilmore, J. H. (1999). The Experience Economy: Work is Theatre and Every Business a Stage. Harvard Business School Press.

Expériences de consommation et marketing expérientiel

Carù, A., & Cova, B. (2006). Expériences de consommation et marketing expérientiel. Revue française de gestion, 162, 99-115.

Mots clés : Expérience de consommation, marketing expérientiel, émotions et hédonisme, co-création

Antonella Carù et Bernard Cova examinent dans cet article l’émergence du marketing expérientiel, qui se différencie du marketing traditionnel centré sur les caractéristiques des produits. Ils mettent en avant que les consommateurs modernes ne se contentent plus d’acheter un bien ou un service pour sa seule utilité fonctionnelle, mais recherchent une expérience globale, engageant leurs émotions, leurs sens et leur identité.

La consommation est devenue une pratique expérientielle où l’environnement, la narration et l’immersion jouent un rôle fondamental.

Développement :

  • Définition du marketing expérientiel : Le marketing expérientiel se distingue du marketing traditionnel en mettant l’accent sur l’expérience vécue par le consommateur plutôt que sur le produit lui-même. Il repose sur une approche hédoniste et sensorielle de la consommation, où l’acte d’achat devient une source de plaisir et d’émotions (Carù & Cova, 2006, p. 100).

Cette vision s’inspire des travaux de Holbrook et Hirschman (1982, p. 133), qui ont été parmi les premiers à souligner que la consommation ne se réduit pas à une démarche rationnelle et fonctionnelle, mais qu’elle englobe des composantes affectives, imaginaires et expérientielles.

Selon Pine et Gilmore (1999, p. 47), nous sommes entrés dans une économie de l’expérience, où les entreprises doivent scénariser leur offre pour plonger le consommateur dans un univers immersif et interactif. Cette approche vise à générer des souvenirs positifs et mémorables qui favorisent la fidélisation à la marque.

Les auteurs insistent également sur la distinction entre marketing expérientiel et expériences de consommation :

Le marketing expérientiel correspond aux stratégies mises en place par les entreprises pour concevoir des expériences engageantes (Carù & Cova, 2006, p. 102).

L’expérience de consommation, en revanche, est le vécu subjectif du consommateur, influencé par ses attentes, son environnement et ses interactions (Carù & Cova, 2006, p. 104).

  • Dimensions de l’expérience de consommation :

L’expérience de consommation repose sur cinq dimensions principales :

  1. Sensorielle : Mobilisation des sens (vue, ouïe, toucher, goût, odorat) pour enrichir l’expérience et stimuler l’engagement du consommateur. (Rieunier, 2002)
  2. Émotionnelle : Création de sentiments forts et mémorables chez le consommateur. Plus une expérience est émotionnellement marquante, plus elle renforce l’attachement à la marque (Schmitt, 1999, p. 55).
  3. Cognitive : Sollicitation intellectuelle, curiosité et apprentissage au travers de l’expérience. (Arnould et Thompson, 2005)
  4. Comportementale : Incitation du consommateur à interagir activement avec l’environnement proposé. (Schmitt 1999)
  5. Relationnelle : Développement de liens sociaux et sentiment d’appartenance à une communauté autour de la marque (Arnould & Price, 1993, p. 30).

L’immersion est un facteur clé du marketing expérientiel : plus le consommateur est impliqué dans l’expérience, plus elle sera perçue comme intense et authentique (Csikszentmihalyi, 1990, p. 67).

La co-création et le rôle du consommateur : Contrairement aux approches traditionnelles du marketing, où les entreprises imposent leur vision du produit, le marketing expérientiel favorise une logique de co-création :

  • Le consommateur devient un acteur de son expérience et non plus un simple spectateur.
  • L’interaction avec les autres participants, les employés et l’environnement enrichit le vécu expérientiel (Carù & Cova, 2006, p. 110).

Cette approche rejoint les théories du marketing relationnel, où la fidélisation repose sur une interaction continue et personnalisée entre la marque et ses clients (Firat & Venkatesh, 1995, p. 245).

Les auteurs soulignent plusieurs limites et critiques du marketing expérientiel :

  1. Difficulté de mesure : Contrairement aux stratégies classiques basées sur des indicateurs quantifiables (ventes, taux de conversion), l’impact des expériences sur la fidélisation reste difficile à évaluer (Carù & Cova, 2006, p. 112).
  2. Superficialité et artificialité : Certaines entreprises se contentent d’ajouter des éléments ludiques ou sensoriels sans réelle cohérence, ce qui peut donner une impression de spectacle forcé (Schmitt, 1999, p. 60).
  3. Saturation sensorielle : Trop de stimulations peuvent engendrer un effet d’épuisement cognitif, rendant l’expérience fatigante et contre-productive (Carù & Cova, 2006, p. 113).
  4. Accessibilité et exclusivité : Les expériences les plus marquantes sont souvent coûteuses à mettre en place, ce qui peut les réserver à une élite, excluant une partie du marché (Pine & Gilmore, 1999, p. 58).

Conclusion :

L’article de Carù et Cova offre une analyse approfondie du marketing expérientiel, qui s’impose comme une approche centrale dans la compréhension du comportement des consommateurs modernes. Il met en lumière le rôle crucial des dimensions sensorielles et émotionnelles, ainsi que l’importance de l’immersion et de la co-création dans la construction d’une expérience mémorable. Leur analyse montre que cette approche est un levier puissant pour engager les consommateurs et les fidéliser mais ils mettent en garde sur les dérives, comme la difficulté de mesurer les effets du marketing expérientiel.

Références Bibliographiques 

Holbrook, M. B., & Hirschman, E. C. (1982). The experiential aspects of consumption: Consumer fantasies, feelings, and fun. Journal of Consumer Research, 9(2), 132-140.

Pine, B. J., & Gilmore, J. H. (1999). The experience economy: Work is theatre and every business a stage. Harvard Business School Press.

Csikszentmihalyi, M. (1990). Flow: The psychology of optimal experience. Harper & Row.

Schmitt, B. H. (1999). Experiential marketing: How to get customers to sense, feel, think, act, and relate to your company and brands. Free Press.

Firat, A. F., & Venkatesh, A. (1995). Liberatory postmodernism and the re-enchantment of consumption. Journal of Consumer Research, 22(3), 239-267.

Arnould, E. J., & Price, L. L. (1993). River magic: Extraordinary experience and the extended service encounter. Journal of Consumer Research, 20(1), 24-45.