Référence :
Li, W., Zhao, F., Lee, J. M., Park, J., Septianto, F., & Seo, Y. (2024). How micro- (vs. mega-) influencers generate word of mouth in the digital economy age: The moderating role of mindset. Journal of Business Research, 171, Article number 114387.
Mots-clés : Théories implicites, mentalités, influenceurs des médias sociaux, le bouche à oreille
Introduction :
Le marketing d’influence, donc l’utilisation des influenceurs pour promouvoir un produit, est devenu un outil pour les marques de marketing numérique incontournable (Campbell et Farrell, 2020; Kim & Kim, 2021; Schouten et al., 2020). Ils exercent une influence considérable sur les attitudes et comportements de leurs abonnés (Kim & Kim, 2021). L’industrie mondiale du marketing d’influence a même été estimée à 16,4 milliards USD en 2022 (Geyser, 2022).
L’article explique comment les micro-influenceurs (entre 10 000 et 100 000 abonnés) et les macro-influenceurs (entre 100 000 et 1 million d’abonnés) réussissent à générer du bouche-à-oreille (WOM) dans le cadre des achats en e-commerce. Il repose sur l’effet que peuvent avoir ces SMIs sur la perception et l’engagement des consommateurs et comment la capacité à influencer des influenceurs peut varier en fonction de l’état d’esprit des consommateurs (Murphy & Dweck, 2016).
Les auteurs émettent l’hypothèse que les micro-influenceurs génèrent plus de WOM que les méga-influenceurs, car les consommateurs les perçoivent comme étant plus sincères. Cependant, cet effet se manifeste uniquement chez les consommateurs ayant un mindset de croissance (Dweck & Leggett, 1988). Ceux avec un mindset fixe ne tiendront pas compte de ces différences de motivation.
Développement :
La recherche sur les types de SMI (Social Media Influencers) distingue les influenceurs en fonction de leur nombre de followers: (Campbell & Farrell, 2020, De Veirman et al., 2017, Kay et al., 2020).
- Méga-influenceurs (plus de 1 million de followers)
- Macro-influenceurs (100 000 à 1 million)
- Micro-influenceurs (10 000 à 100 000)
- Nano-influenceurs (moins de 10 000)
Les méga-influenceurs ont tendance à s’appuyer sur leur popularité pour persuader, tandis que les micro-influenceurs s’appuient sur la proximité qu’ils entretiennent avec leur audience (Kay et al., 2020, Park et al., 2021). Concernant leur efficacité, les résultats des recherches antérieures sont contradictoires. Certaines études montrent que les méga-influenceurs sont plus efficaces (Conde & Casais, 2023, De Veirman et al., 2017), tandis que d’autres, ce sont les micro-influenceurs (Borges-Tiago et al., 2023, Kay et al., 2020). Cette variation pourrait être expliquée par différentes dimensions utilisées lors des études.
1. La motivation, la fiabilité et le WOM
Généralement, les consommateurs pensent que les micro-influenceurs sont plus motivés par des raisons personnelles que commerciales, contrairement aux mega-influenceurs (Audrezet et al., 2020, Campbell & Farrell, 2020, Kay et al., 2020). Ils font moins de promotions, semblent moins influencés par les gains financiers, et sont donc perçus comme plus authentiques (Park et al., 2021). Ces différences de motivations influencent la perception de la crédibilité des micro et mega-influenceurs.
→ Cela suggère que les consommateurs seraient plus enclins à générer du WOM pour les micro-influenceurs plutôt que pour les mega-influenceurs, car la crédibilité est un déterminant de l’intention de générer du WOM (Schouten et al., 2020).
2. L’état d’esprit de croissance VS fixe
L’état d’esprit de croissance et fixe désigne la façon dont l’audience juge les comportements des autres. Ceux ayant une mentalité de croissance pensent que les comportements s’adaptent selon les situations, tandis que ceux avec une mentalité fixe pensent que ce sont des traits inchangeables (Chiu et al., 1997, Dweck et Leggett, 1988).
Ces traits affectent la perception des influenceurs par les consommateurs. Les consommateurs ayant une mentalité de croissance, voient les motivations des micro-influenceurs comme étant dépendante à la situation, ce qui les pousse à générer du WOM (bouche-à-oreille) (Dweck et al., 1993 ; Erdley & Dweck, 1993).
Deux hypothèses ont été proposées :
- H1 : Les recommandations faites par des micro-influenceurs augmentent l’intention des consommateurs de générer du bouche-à-oreille parmi ceux ayant une mentalité de croissance.
- H2 : La fiabilité perçue médiatise l’effet du type d’influenceur sur l’intention des consommateurs de générer du bouche-à-oreille, mais uniquement chez ceux ayant une mentalité de croissance.
ETUDE 1 :
L’objectif de cette première étude est d’apporter une première validation empirique de l’hypothèse 1.Contrairement à l’étude 2, cette expérience utilise de vrais influenceurs sur Instagram.
L’étude a impliqué 241 participants, dont 28 % de femmes et un âge moyen de 35 ans. Les participants ont été répartis aléatoirement pour évaluer les pages Instagram de deux influenceurs réels : Negin Mirsalehi (méga-influenceuse) et Hello Rigby (micro-influenceuse).
Les deux influenceurs ont publié une publication sponsorisée d’une barre chocolatée de Utopick, une marque fictive afin d’évaluer leur intention de WOM (Belanche et al., 2021a).
Les résultats montrent que la proximité avec l’influenceur influence significativement les intentions de WOM. Une interaction entre mindset et type d’influenceur a également été observée. Ceux ayant un mindset de croissance ont une intention de WOM plus élevée après avoir vu un micro-influenceur qu’un macro-influenceur, alors qu’aucune différence significative n’a été observée pour les participants avec un mindset fixe. Ces résultats confirment l’hypothèse 1.
ETUDE 2a :
L’objectif de l’étude 2a était double :
- Répliquer les résultats de l’étude 1 en mesurant le mindset comme un trait de personnalité.
- Vérifier que la perception de la fiabilité de l’influenceur explique l’effet du mindset des consommateurs (H2).
Un influenceur fictif (Jasmin Parker) a été établi et l’étude a été réalisée auprès de 241 personnes aux États-Unis dont 50,2 % femmes et un âge moyen de près de 41 ans.
Une analyse de régression modérée (Hayes, 2017) révèle une interaction significative entre le type d’influenceur et le mindset des participants. Les recommandations faites par un micro-influenceur génèrent des intentions de WOM plus élevées chez les participants ayant un mindset de croissance élevé. Cette intention n’est pas significative chez ceux ayant un mindset plus fixe. Cette étude confirme l’hypothèse 1.
L’analyse statistique PROCESS Model 7 (Hayes, 2017) examine comment la fiabilité perçue du type d’influenceur influence les intentions de bouche-à-oreille, et comment cet effet varie selon le mindset (de croissance ou fixe) des participants. Une interaction a été observée et les participants avec un état d’esprit de croissance élevé perçoivent les micro-influenceurs comme plus fiables. Cette perception n’est pas significative chez ceux ayant un mindset plus fixe. Cette étude confirme l’hypothèse 2.
ETUDE 2b :
L’étude 2b visait à confirmer les résultats de l’étude 2a en apportant une preuve causale à l’hypothèse 1. Elle teste également si la fiabilité perçue de l’influenceur explique cet effet (H2). Contrairement à l’étude 2a, où le mindset des participants était mesuré, cette étude l’a directement manipulé.
Les résultats sont identiques à l’étude 2a, pour ceux ayant un mindset de croissance, leur WOM est plus élevé pour un micro-influenceur que pour un méga-influenceur. Il n’y a pas de différence significative pour ceux ayant un mindset fixe.
L’étude 2b confirme l’hypothèse 1.
3. Les liens forts VS faibles
Les études montrent que les liens sociaux et leur force influencent le bouche-à-oreille (WOM) (Brown et Reingen, 1987 ; De Bruyn et Lilien, 2008). Les liens forts, comme avec la famille ou les amis proches, augmentent la confiance dans les recommandations (Chen, 2018 ; Chu et Kim, 2011), contrairement aux liens faibles.
Par conséquent, en présence de recommandations de liens forts, les consommateurs, quelle que soit leur état d’esprit, sont plus enclins à suivre cette recommandation.
C’est ainsi qu’une troisième hypothèse a été formulée :
- H3. L’effet interactif du type d’influenceur et de la mentalité des consommateurs sera atténué en présence de recommandations de liens forts.
ETUDE 3 :
L’étude 3 a testé le rôle modérateur des liens sociaux sur la relation entre le type d’influenceur, le mindset du consommateur et les intentions de bouche-à-oreille (WOM).
Pour cela, l’étude a utilisé un plan expérimental avec 500 participants qui ont été affectés au hasard pour évaluer la page Instagram d’un influenceur fictif, manipulé en tant que micro-influenceur ou méga-influenceur.
La publication mettait en avant un état d’esprit de croissance ou de fixité, et les participants du groupe avec liens sociaux forts ont été informés que la marque avait été recommandée par un ami proche. Les participants ont ensuite répondu aux mesures d’intentions de WOM, aux vérifications de manipulation de l’influenceur et du mindset (Errmann et al., 2019 ; Park et al., 2021 ; Wong et al., 2020).
L’analyse a montré que dans les conditions sans lien social fort, les participants avec un mindset de croissance recommandent plus pour un micro-influenceur (vs un méga-influenceur). En revanche, si le lien social est fort, il n’y a pas de différence significative entre micro et méga-influenceurs, ce qui confirme l’hypothèse 3.
Conclusion :
Les 4 études concluent que les recommandations des micro-influenceurs (vs méga-influenceurs) génèrent un WOM positif plus élevé chez les consommateurs ayant un mindset de croissance (vs un mindset fixe). Ce résultat est également renforcé par la proximité qu’ils ont avec leur audience, les rendant plus fiables et interactifs.
Ainsi, l’étude apporte quatre contributions théoriques majeures :
- Les recommandations des micro-influenceurs génèrent un WOM plus positif chez les consommateurs ayant un mindset de croissance (Kay et al., 2020; Park et al., 2021).
- Le mindset du consommateur joue un rôle crucial dans l’intention de WOM, avec les consommateurs à mindset de croissance considérant les micro-influenceurs comme plus dignes de confiance, ce qui amplifie leurs intentions de WOM (Dweck et al., 1993; Erdley et Dweck, 1993).
- Les comportements des consommateurs sur les réseaux sociaux montrent que les micro-influenceurs stimulent davantage de WOM chez les consommateurs ayant un mindset de croissance (VS mindset fixe) (Jain & Weiten, 2020; Wang, 2021).
- Les perceptions de confiance peuvent être influencées par des indices externes, comme les recommandations de proches, suggérant que les marketeurs doivent considérer plusieurs facteurs pour encourager le WOM (Chu & Kim, 2011).
L’étude présente cependant plusieurs limites comme l’absence de dissociation du WOM en ligne et hors ligne ou encore la réalisation des études uniquement sur Instagram, or les réponses peuvent varier en fonction des plateformes.
Bien que les résultats soient cohérents, les études ayant été réalisées sur des échantillons spécifiques, une réplication sur des populations plus diversifiées et à travers des sources de données secondaires pourraient être bénéfiques.
Intégration dans ma revue de littérature
L’article met en lumière l’efficacité des micro-influenceurs par rapport aux méga-influenceurs dans la génération du bouche-à-oreille, ce qui est directement pertinent puisque lafoodloveuse, avec 33,7k abonnés, est une micro-influenceuse. Il pourrait m’aider à expliquer pourquoi un micro-influenceur peut avoir un impact significatif sur l’image de Cédric Grolet.
Le facteur du mindset peut également enrichir ma recherche.
Référence :
- Audrezet, A., de Kerviler, G., & Guidry Moulard, J. (2020). Authenticity under threat: When social media influencers need to go beyond self-presentation. Journal of Business Research, 117, 557-569.
- Belanche, D., Casaló, L. V., Flavián, M., & Ibáñez-Sánchez, S. (2021). Building influencers’ credibility on Instagram: Effects on followers’ attitudes and behavioral responses toward the influencer. Journal of Retailing and Consumer Services, 61, 102585.
- Borges-Tiago, M. T., Santiago, J., & Tiago, F. (2023). Mega or macro social media influencers: Who endorses brands better? Journal of Business Research, 157, 113606.
- Brown, J. J., & Reingen, P. H. (1987). Social ties and word-of-mouth referral behavior. Journal of Consumer Research, 14(3), 350-362.
- Campbell, C., & Farrell, J. R. (2020). More than meets the eye: The functional components underlying influencer marketing. Business Horizons, 63(4), 469-479.
- Chiu, C.-Y., Dweck, C. S., Tong, J. Y.-Y., & Fu, J. H.-Y. (1997). Implicit theories and conceptions of morality. Journal of Personality and Social Psychology, 73(5), 923-940.
- Chu, S.-C., & Kim, Y. (2011). Determinants of consumer engagement in electronic word-of-mouth (eWOM) in social networking sites. International Journal of Advertising, 30(1), 47-75.
- De Bruyn, A., & Lilien, G. L. (2008). A multi-stage model of word-of-mouth influence through viral marketing. International Journal of Research in Marketing, 25(3), 151-163.
- De Veirman, M., Cauberghe, V., & Hudders, L. (2017). Marketing through Instagram influencers: The impact of number of followers and product divergence on brand attitude. International Journal of Advertising, 36(5), 798-828.
- Dweck, C. S., & Leggett, E. L. (1988). A social-cognitive approach to motivation and personality. Psychological Review, 95(2), 256-273.
- Errmann, A., Seo, Y., Choi, Y.K., & Yoon, S. (2019). Divergent effects of friend recommendations on disclosed social media advertising in the United States and Korea. Journal of Advertising, 48(5), 495-511.
- Geyser, W. (2022). The state of influencer marketing 2022: Benchmark report. Influencer Marketing Hub.
- Hayes, A. F. (2017). Introduction to mediation, moderation, and conditional process analysis: A regression-based approach (2nd ed.). The Guilford Press.
- Jain, S. P., & Weiten, T. J. (2020). Consumer psychology of implicit theories: A review and agenda. Consumer Psychology Review, 3(1), 60-75.
- Kay, S., Mulcahy, R., & Parkinson, J. (2020). When less is more: The impact of macro and micro social media influencers’ disclosure. Journal of Marketing Management, 36(3-4), 248-278.
- Kim, D. Y., & Kim, H.-Y. (2021). Trust me, trust me not: A nuanced view of influencer marketing on social media. Journal of Business Research, 134, 223-232.
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- Wong, V.C., Su, L., & Lam, H.P.-Y. (2020). When less is more: How mindset influences consumers’ responses to products with reduced negative attributes. Journal of Marketing, 84(5), 137-153