Mackey, A., Mackey, T. B., & Barney, J. B. (2007). Corporate social responsibility and firm performance: Investor preferences and corporate strategies. Academy of Management Review, 32(3), 817–835.
Mots-clés : Responsabilité sociale des entreprises, performance financière, investisseurs, stratégie d’entreprise
L’article de Mackey, Mackey et Barney (2007) examine la relation entre la responsabilité sociale des entreprises (RSE) et leur performance financière. Ce débat oppose deux visions : certains considèrent que les entreprises doivent maximiser leurs profits sans se soucier des impacts RSE (Friedman, 1962), tandis que d’autres avancent que les entreprises ont un rôle plus large dans la société et doivent parfois privilégier des actions responsables, même si cela réduit leur rentabilité immédiate (Swanson, 1999 ; Whetten, Rands, & Godfrey, 2001).
Les auteurs proposent un modèle théorique où la RSE est perçue comme un produit : certaines entreprises l’adoptent pour attirer des investisseurs soucieux d’éthique, tandis que d’autres l’évitent si elles estiment que cela pourrait nuire à leur rentabilité (Margolis & Walsh, 2003). Traditionnellement, la performance des entreprises est mesurée à travers des indicateurs comptables ou boursiers (Orlitzky & al., 2003). Dans ce modèle, la valeur d’une entreprise dépend de l’offre et la demande d’investissements socialement responsables. Si les investisseurs privilégient massivement les entreprises engagées dans la RSE, leur valeur boursière peut augmenter, même si la RSE ne génère pas directement de bénéfices (Orlitzky & al., 2003).
Cependant, l’impact de la RSE sur la performance financière varie selon le marché. Lorsque la demande pour les entreprises responsables est supérieure à l’offre, celles qui adoptent la RSE peuvent voir leur valorisation boursière croître. À l’inverse, si trop d’entreprises adoptent ces pratiques et que la demande est insuffisante, leur valeur peut diminuer (Godfrey, 2004 ; McWilliams & Siegel, 2001). Cela explique pourquoi certaines entreprises hésitent à s’engager dans la RSE, craignant un retour sur investissement incertain.
L’étude met aussi en avant le rôle des investisseurs. Certains d’entre eux acceptent des rendements plus faibles en échange d’un engagement social aligné avec leurs valeurs (Social Investment Forum, 2005). C’est notamment le cas des fonds d’investissement socialement responsables, qui privilégient des entreprises éthiques même si leur rentabilité est parfois moindre (Geczy, Stambaugh, & Levin, 2003).
Les implications de cette étude sont multiples. Premièrement, les entreprises doivent évaluer l’intérêt des investisseurs avant d’adopter des pratiques RSE. Deuxièmement, la performance financière d’une entreprise dépend des fluctuations de l’offre et de la demande en matière d’investissement responsable. Enfin, les auteurs remettent en question l’idée que la RSE est toujours bénéfique ou nuisible : son impact dépend largement du contexte de marché et des attentes des investisseurs.
En conclusion, Mackey, Mackey et Barney (2007) proposent une approche nuancée de l’effet de la RSE sur la performance des entreprises. Leur modèle démontre que la valeur d’une entreprise ne repose pas uniquement sur ses flux de trésorerie futurs, mais aussi sur les préférences des investisseurs. Ainsi, sous certaines conditions de marché, adopter la RSE peut être un levier de valorisation, alors que dans d’autres situations, cela peut être un frein. Les auteurs invitent donc à considérer la RSE comme un élément d’investissement stratégique, et pas seulement éthique, dont l’impact varie en fonction des dynamiques du marché.
Références :
- Friedman, M. (1962). Capitalism and freedom. University of Chicago Press.
- Swanson, D. L. (1999). Toward an integrative theory for business and society: A research strategy for corporate social performance. Academy of Management Review, 24(3), 506–521.
- Whetten, D. A., Rands, G., & Godfrey, P. C. (2001). What are the responsibilities of business to society? In A. Pettigrew, H. Thomas, & R. Whittington (Eds.), Handbook of strategy and management (pp. 373–410). Sage.
- Margolis, J. D., & Walsh, J. P. (2003). Misery loves companies: Rethinking social initiatives by business. Administrative Science Quarterly, 48(2), 268–305.
- Orlitzky, M., Schmidt, F. L., & Rynes, S. L. (2003). Corporate social and financial performance: A meta-analysis. Organization Studies, 24(3), 403–441.
- Godfrey, P. C. (2004). The relationship between corporate philanthropy and shareholder wealth: A risk management perspective. Academy of Management Review, 30(4), 777–798.
- McWilliams, A., & Siegel, D. (2001). Corporate social responsibility: A theory of the firm perspective. Academy of Management Review, 26(1), 117–127.
- Social Investment Forum. (2005). 2005 Report on socially responsible investing trends in the United States. http://www.socialinvest.org/areas/research/trends/sri_trends_report_2005.pdf
- Geczy, C. C., Stambaugh, R. F., & Levin, D. (2003). Investing in socially responsible mutual funds. Working paper, Wharton School, University of Pennsylvania.