Panorama de l’industrie française de l’assurance

José Bardaji (2017), Panorama de l’industrie française de l’assurance, Revue d’économie financière, (N° 126), pages 19 à 40 https://doi.org/10.3917/ecofi.126.0019

 

Mots clés : Industrie, Panorama, Industrie française, Assurance

 

L’assurance en France collecte plus de 200 Md€ de cotisations chaque année et dispose d’un portefeuille de placements de près de 2 300Md€, soit 103% du PIB. Ces différentes statistiques reflètent le poids économique et social particulièrement élevé de cette industrie, tant elle accompagne tous les Français, particuliers ou entreprises, à tous les stades de la vie ou de leur développement. En effet, l’assurance protège les Français et leurs biens (voiture, habitation, etc.) contre des risques de toutes natures. Elle protège aussi l’activité et les biens des entreprises, de plus en plus des conséquences d’une attaque informatique. En raison du succès de l’assurance vie, elle finance massivement l’économie, notamment, les entreprises (59 %), mais aussi les États (33 %) ; ces investissements prennent la forme d’obligations (71 %), mais aussi d’actions (17 %). Enfin, l’assurance française s’internationalise lentement avec un chiffre d’affaires réalisé à l’étranger en légère hausse, tout comme celui réalisé par des assureurs étrangers en France, signe d’une certaine maturité du marché français de l’assurance.

 

 

Développement:

Dans cet article, nous allons parler de l’assurance sous différents aspects (industrie, au service de la protection, mais également de l’épargne et du financement de l’économie, l’assurance française dans le monde et dans notre quotidien).

L’assurance française représente ainsi 209 Md€ de cotisations perçues , dont près de deux tiers au titre de l’assurance vie, et du tiers restant au titre de l’assurance non-vie qui regroupe les assurances de biens et de responsabilité et les assurances de dommages corporels (maladie et prévoyance). Cette séparation entre assurance vie et non-vie est usuelle, mais pas forcément partagée par l’ensemble des acteurs de la profession, ni par l’ensemble des pays. Parfois on préfère distinguer les assurances de personnes (vie et dommages corporels) des assurances de dommages.

Les assurances de biens et de responsabilité ont collecté un peu plus de 53 Md€ de cotisations en 2016, dont près des deux-tiers portent sur des assurances de particuliers (automobile, habitation, etc.) et le tiers restant sur des assurances de professionnels (biens professionnels, responsabilité civile générale, construction…).

  • L’assurance automobile:

C’est la branche non-vie la plus importante. Avec un peu plus de 20 Md€ de cotisations en 2016, elle représente près de 40 % des cotisations totales en assurances dommages. Le montant des cotisations évolue régulièrement (18 Md€ en 2007). La prime moyenne globale d’une assurance voiture s’établit à 400 euros HT (en France, un total de 52 millions de véhicules étaient assurés en 2016). Les sociétés avec intermédiaires, qui correspondent souvent aux sociétés d’assurance anonymes, sont les plus implantées sur ce marché avec une part de marché de 41,4 %, devant les mutuelles sans intermédiaires (34,0 %). La bancassurance arrive en 3e position (12,9 %), mais connaît une nette progression depuis plusieurs années. L’assurance automobile reste un produit d’appel. À l’avenir, l’assurance automobile reste sujette à des mutations d’envergure. Les dispositifs d’aide à la conduite et, demain, la voiture autonome laissent attendre une baisse sensible de la sinistralité et, en corollaire, des cotisations. Pour la principale branche de l’assurance dommages, cette évolution invite la profession à accompagner la mutation de l’industrie automobile de demain.

  • L’assurance habitation:

On parle de multirisque habitation, elle garanti garantit l’assuré contre des événements qui pourraient l’affecter comme l’incendie, le vol, le dégât des eaux, les tempêtes et les catastrophes naturelles, ainsi que la responsabilité du chef de famille contre les dommages qui pourraient être causés à autrui. C’est la deuxième branche non-vie la plus importante par le poids qu’elle représente en termes de cotisations, après l’automobile. Avec près de 10 Md€ en 2016, elle représente environ 20 % des cotisations totales en assurances de biens et de responsabilité. En 2015, on dénombrait en France 39,7 millions de contrats d’assurance habitation. Contrairement à l’assurance automobile, cette assurance n’est pas toujours obligatoire. Elle l’est uniquement pour les locataires et les propriétaires, si le logement est situé dans une copropriété. Dans une moindre mesure qu’en automobile, l’assurance habitation est aussi un produit d’appel pour les sociétés d’assurance.

  • L’assurance dommages aux bien professionnels:

Elle vise à protéger les biens des entreprises comme l’assurance contre l’incendie et l’assurance « pertes d’exploitation » qui s’applique lorsqu’il y a une interruption d’activité liée à une catastrophe naturelle (tempête, inondation, etc.). Les assurances de dommages aux biens des professionnels recouvrent différentes assurances : les multirisques pour les artisans, les commerçants et les professions de services, les assurances de risques industriels, les dommages aux biens agricoles et autres dommages aux biens professionnels. Avec un chiffre d’affaires de 7,6 Md€, l’activité de cette branche est particulièrement le reflet de l’environnement économique. Ainsi, depuis la grande récession de 2008-2009, le dynamisme de ce marché est faible et la capacité des entreprises à étendre le champ de leurs garanties est limitée du fait d’une activité économique atone.

  • L’assurance de protection sociale: 

C’est un complément des régimes obligatoires dans le financement de compléments de retraite, le remboursement de frais de soins, le versement d’indemnités en cas d’arrêt de travail, d’invalidité ou de dépendance et le paiement d’un capital ou d’une rente en cas de décès. Une partie de ces contrats est spécifiquement destinée à se constituer un revenu de remplacement au moment de la survenance du risque. Les prestations sociales s’établissent à près de 700 Md€. Ce montant comprend les prestations versées au titre de la vieillesse-survie (45 %), de la santé (35 %), de la maternité-famille (8 %), de l’emploi (6 %) et des autres risques (6 %). Les organismes d’assurance ont collecté 66 Md€ et versé 46 Md€ de prestations au titre des risques sociaux ce qui représente l’équivalent de 7 % des prestations sociales. En santé, les dépenses (consommation de soins et de biens médicaux) s’élèvent à 194,6 Md€ en 2015.

 

Les assurances d’épargne sont basées sur l’espérance de vie de l’assuré. Le contrat prévoit, en échange de cotisations, le versement d’un capital ou d’une rente soit si l’assuré est en vie à une date donnée (contrat en cas de vie), soit s’il décède (contrat en cas de décès). L’épargne constituée peut indifféremment être utilisée en vue d’un projet immobilier, pour préparer la retraite, transmettre à son conjoint ou à ses héritiers un capital. Pour toutes ces raisons, on évoque souvent la dimension « couteau suisse » de l’assurance vie.

  • L’assurance vie

Elle est principalement composée de deux types de supports, en euros et en unités de compte. Les premiers offrent une liquidité à tout instant et la garantie en capital. Les seconds offrent une espérance de rendement supérieur au prix d’une absence de garantie du capital. En raison de son succès, l’assurance vie occupe une place première dans le patrimoine des Français. À la fin de 2016, ce patrimoine est estimé à près de 12 000 Md€, soit 5,4 fois la richesse nationale. Il est composé de 60 % d’actifs non financiers (immobilier, terrains bâtis, or, objets de valeur, etc.) et de 40 % d’actifs financiers. Dans ce total, la part de l’assurance s’élève à 16 %. Au sein de l’épargne financière, l’assurance vie maintient sa première place en 2016.

 

L’assurance joue un rôle primordial dans le financement de l’économie. À la fin de 2016, les placements des sociétés d’assurance représentent ainsi 2 350 Md€, soit un peu plus d’une année de richesse créée en France. En raison du poids de l’assurance vie, les sociétés d’assurance vie et mixtes détiennent 91 % des placements totaux. Ces placements ont bien progressés. Cette progression provient principalement de la collecte nette en assurance vie conjuguée au rendement des actifs en portefeuille. Les placements auprès des entreprises représentent ainsi en 2016 1 384 Md€, soit 59 % des investissements totaux des sociétés d’assurances.

Le marché de l’assurance en France est le cinquième au monde, derrière les marchés américain, japonais, chinois et britannique et il offre des perspectives de développement pour les entreprises étrangères. Cette stabilité peut témoigner de la maturité du marché français. Les perspectives de croissance y sont mesurées et incertaines, car le marché est concurrentiel et présente une réglementation complexe et une fiscalité mouvante.

L’activité des entreprises étrangères en France présente deux caractéristiques. Ce sont essentiellement des assureurs européens qui officient via des filiales. Plus de 90 % des primes des entreprises étrangères réalisées sur le marché français sont le fait d’entreprises allemandes, italiennes, britanniques et suisses. Le développement des assureurs français à l’étranger est don très fort.

 

 

Résultats:

La profession de l’assurance, à l’image du secteur financier dans son ensemble, fait face à plusieurs défis dont trois sont particulièrement d’actualité :

  1. le premier est économique avec cet environnement de taux durablement bas qui met à mal le modèle de l’assurance vie et non-vie. L’expérience japonaise, qui évolue dans cet environnement depuis plusieurs années déjà, est là pour témoigner aussi bien de la difficulté que de la capacité de notre industrie à s’y adapter ;
  2. le deuxième est réglementaire avec l’avalanche de textes nationaux, régionaux et internationaux, notamment au lendemain de la grande récession de 2008-2009. Ces textes ambitionnent tous de protéger la profession et le consommateur, mais parfois ils pâtissent d’une coordination minimale entre les autorités et d’une prudence excessive, au risque de pénaliser le level playing field et le financement de l’économie respectivement ;
  3. le troisième est technologique avec la révolution numérique qui apporte déjà des transformations majeures à tous les niveaux : la vente, le marketing, la conception des produits, la tarification, la souscription et la gestion des sinistres. Cette destruction créatrice n’est pas en soi nouvelle. La rapidité avec laquelle elle se diffuse l’est davantage. Elle oblige à repenser notre activité et ouvre des perspectives des plus réjouissantes.

 

 

Conclusion:

Le panorama dressé dans cet article affirme la place de l’assurance dans le quotidien des Français, particuliers ou professionnels, parfois de manière discrète quand il s’agit de financer l’économie. Pour notre habitation, elle intervient en amont pour constituer une épargne à l’aide d’une assurance vie, en amont encore pour compléter le financement qui nécessite une assurance emprunteur permettant de solliciter un prêt bancaire, pendant la construction en assurant la maîtrise d’œuvre et d’ouvrage, en aval enfin pour s’assurer des dégâts causés par les intempéries, les éventuels vols et autres sinistres de la vie quotidienne.

 

 

Références:

  • AFA (Association française de l’assurance) (2015), « Risques climatiques : quel impact sur l’assurance contre les aléas naturels à l’horizon 2040 ? », décembre.
  • FFA (Fédération française de l’assurance) (2017), « Les assurances de personnes et de biens et de responsabilité », Données clés 2016.
  • INSEE (2014), Les comptes nationaux passent en base 2010, L’économie française, édition 2014.
  • NOVETHIC (2016), Les chiffres 2015 de l’investissement responsable en France, mai.
  • SWISS RE (2016), « L’assurance dans le monde en 2015 : une croissance continue cachant des disparités régionales », Sigma, n° 3.