Droits de contrôle versus droits pécuniaires, crise financière et vulnérabilité des banques européennes

Nadia Saghi-ZedekAmine Tarazi (2015), Droits de contrôle versus droits pécuniaires, crise financière et vulnérabilité des banques européennes, Revue économique, (Vol. 66), pages 527 à 535 https://doi.org/10.3917/reco.663.0527

Mots clés : Droits, contrôle, pécuniaires, crise financière, banques

 

Durant la crise financière de 2007-2008, plusieurs banques ont connu des performances désastreuses et suite à ça, certaines ont fait faillite et d’autres ont nécessité une intervention des États pour les recapitaliser ou pour les nationaliser.

Dans cet article, on étudie l’impact d’une divergence entre droits de contrôle et droits pécuniaires des actionnaires ultimes sur le risque de défaut des banques européennes.

 

Développement:

Dans cette étude, les chercheurs étudient les chaînes de contrôle des banques européennes et en nous interrogeant tout particulièrement sur le rôle joué par les actionnaires ultimes lorsque ceux-ci possèdent davantage de droits de contrôle que de droits pécuniaires.

Après avoir proposé, dans un premier temps d’exposer l’échantillon ainsi que le modèle, dans un second temps, on aborde les résultats empiriques.

L’échantillon comprend 750 banques commerciales européennes dont 109 sont des banques cotées de 2002 à 2010. Les chercheurs extraient des données comptables ainsi que des données sur la structure actionnariale. Ils ont alors constitué un modèle pour tester l’effet de la divergence entre droits de contrôle et droits pécuniaires d’un actionnaire ultime sur le risque de défaut des banques pendant les périodes de stabilité (2002-2006), de crise (2007-2008) et de convalescence (2009-2010). Dans ce modèle, la variable a expliquée qui mesure le risque de défaut des banques sont deux variables indicatrices qui sont égales à l’unité si l’observation est de 2007-2008 ou de 2009-2010 respectivement, et zéro autrement. Ils ont alors mesuré le risque de défaut des banques par des indicateurs basés sur des données comptables et sur des données de marché. ainsi que mesurer le risque de défaut par la distance à la faillite de la banque (DD) calculée à partir des modèles d’autres chercheurs (Black et Scholes [1973] et Merton [1977]). A noter que des valeurs faibles de toutes ces mesures indiquent un risque de défaut élevé.

Tout d’abord, les chercheurs examinent l’effet de la divergence entre droits de contrôle et droits pécuniaires d’un actionnaire ultime sur le risque de défaut des banques pendant les périodes de stabilité, de crise et de convalescence. Ensuite, ils examinent l’influence de certains facteurs sur la relation entre cette divergence et le risque de défaut des banques.

 

Résultats:

Les résultats montrent que, bien que cette divergence soit associée en temps normal à un risque de défaut plus élevé, c’est-à-dire que la divergence entre droits de contrôle et droits pécuniaires d’un actionnaire ultime augmente le risque de défaut des banques en temps normal. Elle a, a contrario, contribué à la résilience des banques pendant la crise financière de 2007-2008. Une analyse plus approfondie montre qu’un tel effet est accentué lorsque la banque est contrôlée par un actionnariat de type familial ou lorsque la banque est située dans un pays à faible protection des actionnaires.

Les études antérieures montrent que l’enracinement de l’actionnariat de contrôle s’accentue lorsqu’il est de type familial ou lorsqu’il contrôle une banque située dans un pays à faible protection des actionnaires minoritaire.

Dans cette étude, les résultats montrent également que l’effet de la divergence entre droits de contrôle et droits pécuniaires sur le risque de défaut est accentué lorsque l’actionnaire ultime est une famille ou lorsque la banque est située dans un pays à faible protection des actionnaires et ce quelle que soit la période considérée.

 

Conclusion:

L’objectif de cet article est d’étudier l’effet de la divergence entre les droits de contrôle et les droits pécuniaires d’un actionnaire ultime sur le risque de défaut des banques en temps normal et en période de crise. Globalement, les résultats montrent que, bien que la divergence entre droits de contrôle et droits pécuniaires d’un actionnaire ultime soit associée à un risque de défaut plus élevé des banques pendant les périodes de stabilité et de convalescence, une telle divergence a au contraire contribué à une meilleure résilience pendant la crise financière de 2007-2008.

 

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